Archives mensuelles : novembre 2016

10 New Songs

Je me souviens exactement de l’instant et de l’endroit où je me trouvais quand j’ai entendu pour la première fois les 10 New Songs de Leonard Cohen. C’était au Virgin (aujourd’hui disparu) des Champs-Élysées à Paris, en nocturne un soir de semaine.

On n’achetait pas autant de musique que maintenant à cette époque, surtout on achetait des disques, des CD, qui étaient relativement chers. Souvent plusieurs faisaient envie, il fallait choisir mais celui-ci c’était indiscutable, il m’a fallu l’acheter séance tenante.

En parcourant les nouveautés ce soir-là, ma pile de CD à écouter à la main je me suis installée à une borne d’écoute — c’était tout l’intérêt du Virgin qui proposait l’intégralité de son catalogue en écoute, ce n’était pas si courant en ce temps-là. Dans ma pile le nouveau Leonard Cohen, j’en étais restée à Suzanne plus ou moins mais c’était un grand nom pour ma génération alors pourquoi ne pas voir ce que valait ce nouvel opus ?

Dans les écouteurs, un choc, il y a eu un avant et un après 10 New Songs. De ma pile de disques si je devais n’en acheter qu’un ce soir-là, je décidai instantanément que ce serait celui-ci. Dont acte.

Je l’emportais partout avec moi ce CD, puis ça a été le premier album que j’ai intégralement importé dans mon premier ordinateur portable pour l’avoir toujours avec moi, après avoir aussi transporté le disque lui-même et sa boîte dans ma mallette informatique. Plus tard encore le premier recopié dans mon premier lecteur mp3, un iPod en son temps. J’ai toujours le CD original acheté au Virgin ce soir-là, la version numérique est passée d’ordinateur en ordinateur au fur et à mesure de mes renouvellements de machines, elle est aussi dans mon téléphone, dans différents lecteurs mp3 qui me restent, des clefs USB, bref je l’ai toujours avec moi dans un format ou un autre. Maintenant je l’ai également en vinyle, le premier vinyle que j’ai racheté, la boucle est pour ainsi dire bouclée.

J’en avais offert aussi un exemplaire à Dorothy qui l’écoutait sans discontinuer sur la platine CD que je lui avais donnée et que j’avais installée et branchée sur l’antique chaîne hi-fi dans son salon.

And quiet is the thought of you
The file on you complete
Except what we forgot to do
A thousand kisses deep

Les thousand kisses deep sont pour Dorothy évidemment.

So long, Leonard

Ce matin en regardant les nouvelles, l’annonce de la mort de Leonard Cohen, mon chanteur préféré. Ses albums je les ai tous, si je devais partir sur une île déserte et me limiter à un seul artiste un seul album ce serait sans hésitation sans indécision aucune, Leonard Cohen et ses 10 New Songs. Voici ce que j’avais écrit à son propos dans les lettres à Dorothy (Le blog de Lorelei : À propos de Leonard) :

«  Leonard Cohen, 10 New Songs, tu te souviens ?

Ton disque préféré, le mien aussi. Sans s’être concertées.
Quand je te l’avais donné tu étais devenue accro instantanément.
Les paroles la musique la voix.
Comme moi. Tu l’écoutais en boucle. Je l’écoutais en boucle. »

[…]

« J’ai mis 10 ans avant de pouvoir écouter à nouveau les 10 New Songs. Mon disque préféré. J’avais les chansons dans la tête mais impossible de mettre le disque, pas la force de l’écouter tout haut — un nœud dans la gorge.

Et toi, l’as-tu écouté encore après, l’écoutes-tu toujours ?
Ou l’avais-tu jeté ?

Je te laisse comme je te laissais dans le temps, sur la musique de Leonard,

A sip of wine,
a cigarette,
and then it’s time to go… »

Ce soir plus que jamais, une gorgée de vin, j’aurais bien fumé un petit cigare cubain en l’honneur de Leonard mais il fait trop froid dehors.
Et il est temps de partir…

 

So long Leonard, fare thee well

[Le blog de Lorelei : http://dorothyetlorelei.wordpress.com/2014/12/05/a-propos-de-leonard/ ]

Stress administratif — trace

Je n’ai publié le texte sur les stress administratifs que bien après coup pour ne pas nous porter la poisse — superstition. Elle est là la superstition du XXIe siècle, plus qu’une superstition d’ailleurs puisque cela arrive vraiment. Foin des échelles, des chats noirs, ce sont les échelles les miroirs brisés et les chats noirs de ce début de XXIe siècle décidément peu convaincant en termes de progrès humain — une véritable et inexorable régression depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale semble-t-il.

Et je n’ai même pas parlé des autres stress administratifs « mineurs » dans la même semaine, il y en a eu, il y en a d’ailleurs tous les jours, sauf les week-ends peut-être. Et encore, pendant le week-end on stresse sur ce qui n’a pas pu être réglé la semaine précédente, ce qui est pendu comme une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes pour la semaine à venir, épée qui va s’abattre brutalement à la première heure le lundi matin avant d’avoir pu même agir.

Stress administratif

99% de nos stress actuels viennent de corvées situations ou problèmes administratifs, je ne parle pas ici des stress liés à nos relations interpersonnelles avec nos proches, moins proches et inconnus — c’est un autre sujet. Mais des stress quasi quotidiens auxquels nous sommes confrontés : un bombardement administratif paperassier ou pas paperassier — c’est rare, il y a de plus en plus de paperasse administrative et légale impliquée dans le moindre de nos actes quotidiens.

L’autre semaine, pas moins de deux gros stress purement administratifs, le renouvellement de mon passeport au consulat français de New York et l’obtention du permis de conduire du New Jersey (pourquoi faire simple, il y en a un par état, soit 50 permis de conduire différents, vive le système fédéral — c’est un autre sujet aussi) pour mon fils cadet.

Le permis ça consiste en une paperasse inouïe, des bureaucrates pires que tatillons, une identité à prouver à l’aide de (bons) points — sic ! Il en faut 6, chaque document administratif, ou pas administratif d’ailleurs, chaque document plus ou moins officiel, certaines fois moins que plus, vaut tant de points dans un barème pondu par des bureaucrates qui n’ont rien à envier à nos énarques — ils sont pires, ce n’est rien de le dire— surtout dans un pays où l’idée même d’une carte d’identité nationale (ou fédérale) est honnie : c’est une idée du diable en personne à tout le moins pour les Américains. Aucun, et je pèse mes mots, aucun Américain ne veut en entendre parler. Comme ça c’est facile sans carte d’identité de prouver son identité ! Encore mieux quand moins de 5% des citoyens possèdent un passeport. Inutile de dire que les documents officiels et gouvernementaux étrangers n’ont aucune valeur y compris les passeports étrangers, cherchez l’erreur, j’avais cru comprendre justement qu’un passeport était un document officiel pour prouver son identité dans un pays autre que son pays d’origine, mais j’ai dû mal comprendre. Et mon consulat aussi, qui m’avait dit pour le mien de permis, d’utiliser mon passeport français comme papier d’identité si je manquais de points. Ça ne marche pas dans le New Jersey. Étonnant aussi quand finalement la preuve d’identité principale, le papier d’identité qu’on vous demande partout aux États-Unis, bref la « carte d’identité » ultime  c’est… le permis de conduire. Il faut juste arriver à l’obtenir la première fois. Dans le New Jersey ça se renouvelle tous les 4 ans histoire de faire simple encore, mais, ironie perfide, le permis en passe d’être périmé justement sert de preuve d’identité et rapporte ces fameux points d’identité, un seul je crois, mais certaines fois ça se joue à un point. Vraiment tout est une question d’avoir le premier exemplaire de ce sésame. Indice : il suffit de passer à travers les mailles du filet bureaucratique, on finit par y arriver, certaines fois il faut récidiver, se présenter et se faire refouler plusieurs fois, mais on finit par y arriver. Bien sûr toute cette folie de points c’est pour notre sécurité. Je suis rassurée si c’est pour notre sécurité… quand les gens légitimes n’arrivent pas à avoir assez de points… En dernier ressort c’est l’extrait de naissance (américain sinon rien, bien sûr)… sans photo, qui peut apporter les 4 points de base si l’on n’a pas de passeport. Cherchez l’erreur. Il faut l’avoir vécu pour en témoigner et être cru…

Voilà, l’origine majeure du stress, ce n’est pas de passer la conduite (qui se déroule sur un parking avec une voiture à boîte automatique), c’est la paperasse : on peut bien réussir son test de conduite, si facile, et être refoulé par manque de points d’identité. Une initiale de second prénom manquante ou en trop sur une carte bancaire peut nous faire refouler inexorablement, j’en parle en connaissance de cause, ça m’est arrivé. Oui, la carte bancaire est une preuve d’identité (sans photo n’est-ce pas, c’est plus rigoureux). D’ailleurs la carte bancaire en question je l’avais obtenue de ma banque… grâce à mon passeport français comme preuve d’identité. Ça ne se raconte pas, ça se visite, il faut l’avoir vécu pour y croire !

Quant au passeport français à renouveler (auprès de l’administration française donc, en l’occurrence le consulat français à New York), même si tout est en règle et facile a priori (je suis inscrite au consulat, j’ai mon ancien passeport, c’est un simple renouvellement, je suis de nationalité française d’une famille française depuis au moins le XIVe siècle voire depuis Clovis, j’ai tous les papiers demandés, les preuves d’adresse, l’acte intégral de naissance, les photos qui suivent les mensurations officielles et obligatoires) je peux être refoulée pour un rien, un papier trop ancien (qui date de 3 mois et 2 jours par exemple) une photo décalée de 2 millimètres ou un poil trop claire ou trop foncée, l’humeur de l’employé ou sa propension à un zèle extrême lui-même motivé par un zèle à l’autre bout, en France, là où le passeport est effectivement fabriqué, il faut bien le dire. Ceci dit les employés du consulat de New York ont toujours été efficaces et charmants depuis le début, mais il suffit que les procédures soient durcies au dernier moment pour une raison de sécurité ou une autre.

Pour le permis de conduire du New Jersey par contre, il faut bien tenir compte de l’incompétence crasse des employés du Motor Vehicule Service du New Jersey, en 14 ans et de multiples visites pour moi ou les enfants, je n’en ai jamais rencontré de compétents ni de charmants —tous sont zélés et au delà, sans nécessité ni efficacité et tous sont extrêmement désagréables — dans cette administration on fait tout pour vous rendre la vie difficile. Fait connu, le Motor Vehicule Services du New Jersey est le pire de tous les États-Unis. Un détail peut vous faire refouler, un timbre mal placé, un autocollant mal attaché sur la voiture, autocollant que l’on enlève tout de suite après avoir passé le permis, c’est un autocollant obligatoire pour passer le permis, il faut payer les 5 ou 6 dollars pour l’acheter (en avance surtout, pas le jour même sinon l’on est refoulé), le coller juste le jour du permis sur sa voiture, celle avec laquelle on passe le permis. Tout le monde l’enlève juste après parce sinon c’est le meilleur moyen de se faire contrôler pour rien par la police — l’autocollant crie « nouveau conducteur » — je vous parle d’un pays qui ne veut absolument pas entendre parler du A (anciennement le 90) pour les nouveaux conducteurs, pour des raisons de sécurité encore… peur que les jeunes de 17 ans se fassent attaquer à cause du A sur la voiture qui divulguerait leur âge. Je n’ai pas tout compris là encore… Mais les autocollants réfléchissants orange sur les plaques d’immatriculation ça va ? Sauf que là le vrai risque est de se faire contrôler comme nouveau conducteur par la police, ce qui peut être embêtant si le nouveau conducteur en question a dépassé le couvre-feu de 23h30 par exemple, avec l’autocollant bien visible de nuit parce que réfléchissant c’est facile de se faire repérer par la police — je sais ça paraît incompréhensible, c’est la logique américaine, on a le droit de conduire, mais pas dans telles conditions et pas après telle heure etc. Rien de très cohérent et certainement pas carré pour la logique et la rigueur française. Plus de 14 ans après j’en découvre encore.

Et le malheur de tomber sur un employé encore plus zélé et encore plus incompétent que les autres, qui ne comprend pas les règlements et les règles : le coup du passeport français pas valable (ça ce n’est que dans dans le New Jersey, le consulat m’a confirmé que le MVS de l’État de New York et d’autres acceptaient le passeport français), le coup de l’initiale en moins sur un document, peut-être même l’accent sur mon prénom, je n’ai pas encore eu le cas mais pourquoi pas ? Mon fils a son prénom écrit à la française sur certains documents et sur d’autres à l’anglo- saxonne, je m’en suis aperçue avec horreur la veille d’aller passer le permis : le document (d’une autre administration américaine) pourrait être déclaré invalide ou du moins invalide à procurer les fameux points d’identité. Ça m’est arrivé pour la fameuse initiale de mon second prénom manquante, la fois d’avant ou d’après c’était passé pourtant, cette fois là il m’avait fallu récidiver 3 fois pour finir par passer dans les mailles du filet, en l’occurrence en la personne d’une employée moins zélée ou moins tatillonne, ou pas sur ce point-là.